Clap de fin pour l’IKEA danois à Vendenheim : la marque ferme son magasin alsacien et abandonne ses clients

Le magasin Jysk de Vendenheim fermera définitivement ses portes le 28 juin 2025, marquant la fin d’une aventure commerciale de six ans dans la zone d’activité de la rue de l’Électricité. Cette fermeture laisse dix employés sur le carreau et prive la région strasbourgeoise d’une alternative prisée à IKEA.

La décision, annoncée brutalement mardi lors d’une réunion avec la direction régionale, a surpris les équipes locales. “On nous a annoncé ça comme une formalité, sans vraiment d’explications”, confie Martine Schneider, responsable du rayon literie depuis l’ouverture. “Pourtant, nos chiffres étaient corrects, on avait même dépassé nos objectifs sur le mobilier de jardin.”

Cette fermeture s’inscrit dans un mouvement de restructuration nationale. Après Lisieux en mai et Chêne Saint-Armand mi-juin, Vendenheim rejoint une liste qui pourrait s’allonger. L’enseigne danoise, qui comptait 72 magasins français début 2025, révise ses ambitions hexagonales à la baisse malgré un chiffre d’affaires en hausse de 7,6% en 2024.

Fondée en 1979 par Lars Larsen au Danemark, Jysk s’était imposée comme l’alternative scandinave à IKEA avec des magasins de taille humaine. Le point de vente de Vendenheim, 1 200 m² stratégiquement placé près de l’A4 et de la frontière allemande, attirait une clientèle transfrontalière fidèle.

“C’était notre magasin de référence pour refaire la chambre des enfants”, témoigne Sylvie Muller, habitante de Brumath. “Les vendeurs connaissaient leurs produits, on trouvait facilement à se garer.” Cette fidélité locale n’a pas suffi face aux impératifs de rentabilité.

Les raisons officielles restent floues. Plusieurs sources internes évoquent des coûts immobiliers problématiques et une réorganisation logistique nationale. “Il paraît qu’ils veulent concentrer sur des magasins plus grands”, explique un employé anonyme. “Mais notre clientèle venait parfois de Haguenau ou Saverne.”

L’impact local est considérable. Jean-Claude Roth, transporteur à Reichshoffen, perd 15% de son chiffre d’affaires sectoriel. “Il va falloir se retourner vers d’autres clients, mais ce n’est pas évident”, soupire-t-il. Pour la commune, c’est 45 000 euros de taxe professionnelle annuelle en moins.

Les dix salariés se voient proposer des mutations vers Metz, mais tous ne peuvent suivre. “J’ai trois enfants scolarisés ici, je ne peux pas partir comme ça”, explique Sandra, vendeuse décoration. “La direction parle de nous aider, mais concrètement, les perspectives sont limitées.”

Cette situation révèle les fragilités d’un secteur en mutation. Alors que le e-commerce grignote les parts de marché physique, les enseignes d’ameublement adaptent constamment leur modèle. La pandémie avait pourtant boosté temporairement le secteur, les Français investissant massivement dans leur intérieur pendant les confinements.

Les clients avec commandes ou bons d’achat ont jusqu’au 15 juillet pour faire valoir leurs droits via un numéro spécial saturé. “J’ai attendu une heure pour avoir quelqu’un”, se plaint Michel Kronburger, qui avait commandé une chambre en avril. “On me dit que ma commande sera livrée, mais sans garantie de délais.”

Cette gestion chaotique ternit l’image de Jysk. Sur les réseaux sociaux, les témoignages de mécontentement se multiplient. “Six ans qu’on était fidèles, et ils nous lâchent du jour au lendemain”, résume Françoise Hoffmann sur Facebook.

La fermeture fragilise toute la zone commerciale. “Les gens venaient souvent faire plusieurs achats d’un coup”, observe Patricia Klein, gérante de chaussures voisine. “Si on perd cette clientèle de passage, ça va être compliqué pour tout le monde.”

Face à la situation, les élus locaux tentent de réagir. Une mission de prospection a été lancée avec la CCI d’Alsace pour identifier des repreneurs. “L’idéal serait une enseigne dans le même secteur”, assure le maire Christian Rippinger.

Pour les consommateurs alsaciens, l’alternative la plus proche reste IKEA Haguenau, mais l’expérience diffère. “Chez Jysk, on ressortait en vingt minutes”, regrette un habitué. “Maintenant, il faut se farcir tout le parcours IKEA avec la foule du weekend.”